27 juin 2006

Confucius, Entretiens, II, 13

Tzeu koung ayant demandé ce que doit faire un homme honorable, le Maître répondit : « L'homme honorable commence par appliquer ce qu'il veut enseigner ; ensuite il enseigne. »

21 juin 2006

Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, IV, 54

La propriété de la volonté, c'est la vie ; et celle de la vie, le présent. Aussi chacun a-t-il le droit de se dire : "Je suis, une fois pour toutes, maître du présent ; durant l'éternité entière, le présent m'accompagnera, comme mon ombre ; aussi je n'ai point à m'étonner, à demander d'où il est venu, et comment il se fait qu'il tombe justement maintenant."

18 juin 2006

Sénèque, lettres à Lucilius, III, 27, 1 - 3

Je t'entends dire : "C'est toi qui me fais la leçon ; déjà, n'est-ce pas ? tu te l'es faite à toi-même, tu t'es corrigé ? Non, et c'est pourquoi tu as le temps de réformer les autres !" Je n'aurais pas l'audace, moi, un malade, d'entreprendre des cures. Couché dans la même infirmerie, je cause avec toi du mal qui nous est commun et je te passe mes recettes. Ecoute-moi donc comme si je me parlais à moi-même ; je t'ouvre ma vie secrète, et je te prends pour témoin dans les moments où je vérifie mes comptes intimes.
C'est moi qui me crie : "Calcule tes années : tu rougiras de vouloir les mêmes choses que tu voulais dans l'enfance, de viser aux mêmes satisfactions. Voici l'instant, aux approches du jour de la mort, de prendre envers toi-même cet engagement : que tes vices meurent avant toi. Donne congé à ces plaisirs tumultueux dont la rançon est toujours coûteuse. Avant leur venue, une fois passés, ils font du mal. L'inquiétude du crime, encore qu'on n'en ait pas surpris l'exécution, ne disparaît pas avec le crime même ; ainsi, les plaisirs déréglés laissent derrière eux un repentir. Ils ne sont ni solides ni fidèles : même s'ils ne font pas de mal, ils nous abandonnent. Cherche plutôt autour de toi un bien qui soit de durée ; or, il n'y en a point, sauf celui que l'âme tire d'elle-même. Le vertu seule garantit une joie constante et sûre. Si quelque obstacle survient, il en est comme des nuages qui glissent au bas du ciel sans éclipser le jour."

16 juin 2006

Anne Brontë, The Tenant of Wildfell Hall, 9

'Is it that they think it a duty to be continually talking,' pursued she, 'and so never pause to think, but fill up with aimless trifles and vain repetitions when subjects of real interest fail to present themselves ? or do they really take a pleasure in such discourse ?'
'Very likely they do,' said I : 'their shallow minds can hold no great ideas, and their light heads are carried away by trivialities that would not move a better-furnished skull : and their only alternative to such discourse is to plunge over head and ears into the slough of scandal - which is their chief delight.'

13 juin 2006

Epictète, Manuel, 21

La mort, l'exil et toutes ces choses apparemment redoutables, qu'elles soient devant tes yeux jour après jour, et surtout, plus que toutes, la mort. Et rien jamais ne te donnera de basses pensées ni aucun appétit excessif.

10 juin 2006

Proust, Le côté de Guermantes, II, 2

Il n'y a rien comme le désir pour empêcher les choses qu'on dit d'avoir aucune ressemblance avec ce qu'on a dans la pensée.

09 juin 2006

Exode, 20, 1 - 17 [Décalogue]

  1. Alors Dieu prononça toutes ces paroles, en disant:
  2. Je suis l'Éternel, ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays d'Égypte, de la maison de servitude.
  3. Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face.
  4. Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre.
  5. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point; car moi, l'Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent,
  6. et qui fais miséricorde jusqu'en mille générations à ceux qui m'aiment et qui gardent mes commandements.
  7. Tu ne prendras point le nom de l'Éternel, ton Dieu, en vain; car l'Éternel ne laissera point impuni celui qui prendra son nom en vain.
  8. Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier.
  9. Tu travailleras six jours, et tu feras tout ton ouvrage.
  10. Mais le septième jour est le jour du repos de l'Éternel, ton Dieu: tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni l'étranger qui est dans tes portes.
  11. Car en six jours l'Éternel a fait les cieux, la terre et la mer, et tout ce qui y est contenu, et il s'est reposé le septième jour: c'est pourquoi l'Éternel a béni le jour du repos et l'a sanctifié.
  12. Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent dans le pays que l'Éternel, ton Dieu, te donne.
  13. Tu ne tueras point.
  14. Tu ne commettras point d'adultère.
  15. Tu ne déroberas point.
  16. Tu ne porteras point de faux témoignage contre ton prochain.
  17. Tu ne convoiteras point la maison de ton prochain; tu ne convoiteras point la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, ni son âne, ni aucune chose qui appartienne à ton prochain.

05 juin 2006

Proust, Le côté de Guermantes, II, 1

La grande modification qu'amène en nous le réveil est moins de nous introduire dans la vie claire de la conscience que de nous faire perdre le souvenir de la lumière un peu plus tamisée où reposait notre intelligence, comme au fond opalin des eaux. Les pensées à demi voilées sur lesquelles nous voguions il y a un instant encore, entraînaient en nous un mouvement parfaitement suffisant pour que nous ayons pu les désigner sous le nom de veille. Mais les réveils trouvent alors une interférence de mémoire. Peu après, nous les qualifions sommeil parce que nous ne nous les rappelons plus. Et quand luit cette brillante étoile qui, à l'instant du réveil éclaire derrière le dormeur son sommeil tout entier, elle lui fait croire pendant quelques secondes que c'était non du sommeil, mais de la veille ; étoile filante à vrai dire qui emporte avec sa lumière l'existence mensongère, mais les aspects aussi du songe et permet seulement à celui qui s'éveille de se dire : "J'ai dormi."

04 juin 2006

Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, I, 5

La vie et les rêves sont les feuillets d'un livre unique ; la lecture suivie de ces pages est ce qu'on nomme la vie réelle ; mais quand le temps accoutumé de la lecture (le jour) est passé et qu'est venue l'heure du repos, nous continuons à feuilleter négligemment le livre, l'ouvrant au hasard à tel ou tel endroit et tombant tantôt sur une page déjà lue, tantôt sur une que nous ne connaissions pas ; mais c'est toujours le même livre que nous lisons.

02 juin 2006

Shakespeare, Le roi Jean, II, 1, 562 - 599

[Bastard.] - Mad world, mad kings, mad composition !
John, to stop Arthur's title in the whole,
Hath willingly departed with a part ;
And France, whose armour conscience buckled on,
Whom zeal and charity brought to the field
As God's ows soldier, rounded in the ear
With that same purpose-changer, that sly evil,
That broker that still breaks the pate of faith,
That daily break-vow, he that wins all,
Of kings, of beggars, old men, young men, maids, -
Who having no external things to lose
But the word "maid", cheats the poor maid of that, -
That smooth-faced gentleman, tickling commodity ;
Commodity, the bias of the world,
The world who of itself is peisèd well,
Made to run even upon even ground,
Till this advantage, this vile-drawing bias,
This sway of motion, this commodity,
Makes it take head from all indifferency,
From all direction, purpose, course, intent ;
And this same bias, this commodity,
This bawd, this broker, this all-changing word,
Clapped on the outward eye of fickle France,
Hath drawn him from his own determined aid,
From a resolved and honourable war,
To a most base and vile-concluded peace.
And why rail I on this commodity ?
But for because he hath not wooed me yet -
Not that I have the power to clutch my hand
When his fair angels would salute my palm;
But for my hand, as unattempted yet,
Like a poor beggar raileth on the rich.
Well, whiles I am a beggar I will rail,
And say there is no sin but to be rich,
And being rich, my virtue then shall be
To say there is no vice but beggary.
Since kings break faith upon commodity,
Gain, be my lord, for I will worship thee.