10 août 2006

Rousseau, La nouvelle Héloïse, II, lettre XIV à Julie

J'entre avec une secrète horreur dans ce vaste désert du monde. Ce chaos ne m'offre qu'une solitude affreuse où règne un morne silence. Mon âme à la presse cherche à s'y répandre, et se trouve partout resserrée. "Je ne suis jamais moins seul que quand je suis seul", disait un ancien : moi, je ne suis seul que dans la foule, où je ne puis être ni à toi ni aux autres. Mon coeur voudrait parler, il sent qu'il n'est point écouté ; il voudrait répondre, on ne lui dit rien qui puisse aller jusqu'à lui. Je n'entends point la langue du pays, et personne ici n'entend la mienne.

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