Toute chose nouvelle est une négation renouvelée du néant, quelque chose qui n'a jamais été, un commencement pour soi, quelque chose d'inouï, du "nouveau sous le soleil". Infinie est ici la force de la négation du néant, mais fini chaque effet singulier de cette force, infinie la profusion, finie la figure. Sans raison et sans direction, les divers phénomènes émergent de la nuit ; il n'est pas écrit sur leur front d'où ils viennent, où ils vont ; ils sont. En étant, ils sont singuliers, chacun pour sa part contre tous les autres, chacun pour sa part séparé de tous les autres, "particulier", un "non-autre".
19 avril 2007
16 avril 2007
Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, V
Laissées à elles-mêmes, les affaires humaines ne peuvent qu’obéir à la loi de la mortalité, la loi la plus sûre, la seule loi certaine d’une vie passée entre naissance et mort. C’est la faculté d’agir qui interfère avec cette loi parce qu’elle interrompt l’automatisme inexorable de la vie quotidienne, laquelle, nous l’avons vu, a déjà interrompu et troublé le processus de la vie biologique. La vie de l’homme se précipitant vers la mort entraînerait inévitablement à la ruine, à la destruction, tout ce qui est humain, n’était la faculté d’interrompre ce cours et de commencer du neuf, faculté qui est inhérente à l’action comme pour rappeler constamment que les hommes, bien qu’ils doivent mourir, ne sont pas nés pour mourir, mais pour innover.
12 avril 2007
Nietzsche, Le gai savoir, V, §374
L'intellect humain ne peut éviter de se voir lui-même sous ses formes perspectivistes et seulement en elles. Nous ne pouvons contourner notre angle du regard : c'est une curiosité désespérée que de vouloir savoir quelles autres espèces d'intellect et de perspective il pourrait y avoir [...] Mais je pense que du moins nous sommes loin, aujourd'hui, de la présomption ridicule consistant à décréter depuis notre angle que l'on ne peut légitimement avoir de perspective qu'à partir de cet angle-là. Le monde nous est bien plutôt devenu, une fois encore, "infini" : dans la mesure où nous ne pouvons pas écarter la possibilité qu'il renferme en lui des interprétations infinies. Le grand frisson nous saisit une nouvelle fois - mais qui aurait donc envie de recommencer d'emblée à diviniser ce monstre de monde inconnu à la manière ancienne ?
(traduction P. Wotling)
(traduction P. Wotling)
07 avril 2007
Selma Langerlöf, Le violon du fou, 4
Il soupirait fortement, car c'était une tare lourde et contraignante dans la vie que d'avoir comme lui peur de tous les animaux à quatre pattes. A vrai dire, il n'avait peur que des chèvres, et il n'aurait eu peur ni des chevaux ni des chiens ni des chats si seulement il avait pu être sûr qu'ils n'étaient pas quelque espèce de chèvres transformées. Et, de cela, il n'en était jamais certain. De sorte que, finalement, il vivait dans la déraison d'avoir peur de tous les quadrupèdes.
Il ne lui servait à rien de se souvenir de la force qui était la sienne, pas plus que de savoir que ces petits chevaux de paysans étaient en général inoffensifs. Quiconque a laissé entrer la crainte en son âme ne peut plus raisonner ainsi. La crainte est chose difficile, et pesante pour celui en qui elle a élu domicile.
Il ne lui servait à rien de se souvenir de la force qui était la sienne, pas plus que de savoir que ces petits chevaux de paysans étaient en général inoffensifs. Quiconque a laissé entrer la crainte en son âme ne peut plus raisonner ainsi. La crainte est chose difficile, et pesante pour celui en qui elle a élu domicile.
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