16 avril 2007

Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, V

Laissées à elles-mêmes, les affaires humaines ne peuvent qu’obéir à la loi de la mortalité, la loi la plus sûre, la seule loi certaine d’une vie passée entre naissance et mort. C’est la faculté d’agir qui interfère avec cette loi parce qu’elle interrompt l’automatisme inexorable de la vie quotidienne, laquelle, nous l’avons vu, a déjà interrompu et troublé le processus de la vie biologique. La vie de l’homme se précipitant vers la mort entraînerait inévitablement à la ruine, à la destruction, tout ce qui est humain, n’était la faculté d’interrompre ce cours et de commencer du neuf, faculté qui est inhérente à l’action comme pour rappeler constamment que les hommes, bien qu’ils doivent mourir, ne sont pas nés pour mourir, mais pour innover.