03 janvier 2008

Pascal, Pensées, 664 (Le Guern)

Nous ne nous contentons pas de la vie que nous avons en nous et en notre propre être. Nous voulons vivre dans l'idée des autres d'une vie imaginaire, et nous nous efforçons pour cela de paraître. Nous travaillons incessamment à embellir et conserver notre être imaginaire, et négligeons le véritable. Et si nous avons ou la tranquillité ou la générosité ou la fidélité, nous nous empressons de le faire savoir afin d'attacher ces vertus-là à notre autre être et les détacherions plutôt de nous pour les joindre à l'autre. Nous serions de bon coeur poltrons pour en acquérir la réputation d'être vaillants. Grande marque du néant de notre propre être, de n'être pas satisfait de l'un sans l'autre, et d'échanger souvent l'un sans l'autre. Car qui ne mourrait pour conserver son honneur, celui-là serait infâme.